07 mai 2009

 

Nouveaux programmes de maths en seconde:Un avis parmi d'autres.

Lu sur le forum de l'Académie de la Réunion:

"Les mathématiques des XIXe et XXe siècles ne concernent l’enseignement de type lycée que dans une proportion infinitésimale et à un niveau rudimentaire. Les nombreux développements de cette époque (algèbre linéaire, algèbre des structures, analyse fonctionnelle, fonctions analytiques, pour n’en citer que quelques uns) sont enseignés en partie, car le domaine est très vaste, au niveau universitaire et personne ne songe à s’en passer. La plupart des notions étudiées au niveau lycée sont beaucoup plus anciennes, même si elles sont présentées sous une forme évidemment différente avec des notations et un vocabulaire qui correspondent à notre époque.

Si intéressantes que soient les recherches en mathématiques dans les domaines que tu cites, il y en a, grâce à Dieu, beaucoup d’autres. Mais, admettons comme toi que le développement qu’a connu l’informatique ces dernières années nous incite à privilégier les recherches en ce domaine. Le niveau où elles se situent nous dépasse tous. Les mathématiques appliquées sont infiniment plus difficiles que les mathématiques générales et exigent un niveau d’abstraction beaucoup plus élevé qu’on ne le croît. Les jeunes chercheurs qui se lancent dans certains domaines très particuliers doivent acquérir auparavant une grande culture générale dans des directions variées, puis fournir de gros et longs efforts pour se mettre au niveau des spécialistes les plus avancés du secteur.

Redescendons sur terre au niveau de la classe de Seconde qui nous occupe. Ton interrogation est bonne. Que doit-on faire pour préparer au mieux les futures générations au monde qui les attend ? Utiliser l’ordinateur comme un outil d’observations comme nous incite le programme à le faire à plusieurs reprises ? Observer des résultats que l’on ne peut pas justifier (intervalle de confiance) ? Observer des propriétés que l’on peut découvrir autrement en développant des facultés mentales (lieu géométrique, sections planes, propriétés géométriques diverses) ? L’ordinateur n’apporte ici qu’une illustration qui peut certes parfois aider à visualiser certains concepts mais qui est aussi susceptible, plus souvent qu’on ne le croît, de démotiver l’élève. Il est beaucoup plus excitant de découvrir peu à peu une section plane de solide en exerçant le jugement et le raisonnement, en prolongeant certains segments de droite pour pouvoir utiliser des propriétés d’incidence plutôt que de découvrir d’emblée le résultat fourni par la machine.

Tu as raison : derrière l’ordinateur, il y a des hommes qui conçoivent. Mais, ils n’ont pu développer l’imagination nécessaire à leurs travaux que parce qu’au départ ils avaient des structures mentales bien en place et des connaissances suffisamment générales qui ont ouvert leur champ de vision. C’est en faisant travailler leur esprit et non en faisant joujou qu’ils ont pu trouver les ressources nécessaires à l’élaboration de nouveaux concepts. Ils ont commencé par apprendre les mathématiques élémentaires sans se soucier du siècle auquel elles appartenaient.

J’étais au départ comme toi. Je pensais que l’initiation à la programmation pouvait présenter un certain intérêt. Je dis bien à la programmation et non à l’algorithmique (qui existe depuis Euclide) comme le prétend le libellé du programme qui n’évoque par la suite que des compétences informatiques : instructions d’entrée-sortie ; boucles ; tests. Le programme reprend ici ce qui se fait déjà depuis quatre ans dans l’enseignement optionnel de Première et Terminale L. L’expérience que j’en ai eue pendant trois ans m’a convaincu que cela n’apportait pas grand-chose. Les programmes informatiques que l’on peut construire, si on veut rester dans les limites du raisonnable, sont soit artificiels (anagrammes, codages fantaisistes, etc.) et sans intérêt soit trop classiques et déjà inclus dans les instruments de calcul utilisés pour les construire, comme les exemples fournis par le programme : faire évaluer une expression mathématique ; calculer la valeur d’une fonction en un point ; construire une table de valeurs ; calculer les valeurs remarquables d’une série statistiques. Une simple calculatrice fait tout cela fort bien et bien d’autres choses encore. Les élèves sont fort peu motivés et se demandent pourquoi on enfonce une porte ouverte avec un bulldozer. En définitive, les savoir-faire qu’ils en retirent sont bien maigres : programmer des entrées-sorties ; faire des boucles et des tests. Nous avons tous appris tout cela en une heure de temps sans éprouver la moindre difficulté car nous portions déjà en nous, grâce à notre formation générale et malgré notre méconnaissance de l’informatique, les concepts théoriques sous-jacents.

Il faut se méfier de ceux qui s’abritent derrière la modernité pour imposer des pratiques nouvelles. Déjà, dans les années 80, on a voulu nous persuader que pour évoluer avec son temps, il était nécessaire d’introduire dès le collège des concepts tels que les groupes, les anneaux, les corps les relations d’ordre et d’équivalence, les ensembles quotients, etc. C’était la réforme des « maths modernes ». On a même poussé le ridicule jusqu’à distinguer en Quatrième cinq droites différentes suivant qu’elles étaient graduées ou pas, orientées ou pas. Les gens, qui comme moi, protestaient que ces concepts n’apportaient rien à ce niveau car les élèves de cet âge n’ont pas assez d’expériences et de culture pour exhiber des exemples variés et un champ de connaissances suffisant pour les utiliser efficacement, étaient considérés comme de vieux grincheux qui refusaient d’évoluer. On connaît la suite. Le traumatisme a été tel que nous pâtissons aujourd’hui encore du mouvement de réaction qui a produit les excès inverses."

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