"La carrière scientifique de John Nash commence par ses célèbres contributions à la théorie des jeux à 22 ans en 1950, ce qui lui vaudra le Prix Nobel d’économie en 1994. Il se tourne ensuite vers des domaines très différents, et publie, entre 1954 et 1958, trois articles démontrant trois théorèmes qui révolutionnent la géométrie et l’analyse mathématique. Ces trois articles sont de véritables tours de force qui démontrent la puissance de l’analyse dans le traitement de problèmes issus de la géométrie et de la physique."
Par Cédric Villani, professeur à l’École normale supérieure de Lyon, directeur de l’Institut Henri-Poincaré à Paris, médaille Fields 2010 .
Avec Pierre Bremaud, professeur de l’EPFL, auteur de Le dossier Pythagore , Du chamanisme à la mécanique quantique ( Ellipses 2010), et Jean-François Mattei, professeur à l’Université de Nice et membre de l'Institut Universitaire de France, auteur de Pythagore et les pythagoriciens (PUF, 2001)
Une démonstration est un processus dont le but est la construction d'une preuve. Une vérification consiste, lorsque c'est possible, à tester une propriété pour valider ou infirmer sa véracité .
Une vérification n'a pas valeur de démonstration.
Les élèves ont parfois tendance à joyeusement confondre les deux notions, mais cela peut se comprendre .
L'avocat du diable pourrait même prétendre que la confusion existe en filigrane dans le vocabulaire, preuve venant du latin probare (probar en espagnol ou probieren en allemand) qui signifie essayer, vérifier et qui a donné également le mot probable ainsi que le mot éprouvette, synonyme de tube à essais .
Et effectivement, il faut le reconnaître, maintenant que l’ordinateur permet d’effectuer un nombre phénoménal de calculs à une vitesse étourdissante , la frontière entre démonstration et vérification tend à devenir plus ténue, plus floue. Et cela risque de s'aggraver .
( C'est sans doute la raison pour laquelle on a quasiment bouté les Grecs et leur géométrie hors des programmes de mathématiques du lycée, pour les remplacer par des notions d'algorithmique ou d'informatique - plus "sexy", a t-on voulu nous faire croire - Mais après tout, une fois jetés aux orties le latin, les oeuvres classiques, la dissertation, les mots "compliqués", etc ..., la vieille géométrie était en sursis .)
En réalité, les liens entre démonstration et calculs informatiques datent déjà de quelques décennies .
Par exemple :
Le théorème des quatre couleurs dit, pour simplifier, qu’avec quatre couleurs, on peut toujours colorier les pays d'une carte géographique sans que deux pays voisins portent des couleurs identiques. Ce théorème, conjecturé en 1852 par Francis Guthrie, ne fut démontré qu'en juin 1976 par Kenneth Appel et Wolfgang Haken à l'aide d'un calcul par ordinateur. Mais pour autant, ce n’est pas l’ordinateur, bien sûr, qui a fait l’ensemble du travail : Les idées et la structure de la démonstration avaient étaient élaborées par des mathématiciens pendant plus d’un siècle. L'ordinateur, en 1976, ne s'est chargé que du travail de recherche et de vérification, travail qui aurait été trop long pour être effectué par un humain, mais qui n’est pas un raisonnement. L'ordinateur, dans la démonstration du théorème des quatre couleurs, a été certes pratiquement irremplaçable, mais n’en est pas moins resté qu’un assistant .
Dans la vidéo ci-dessous, Gilles Dowek, chercheur, professeur d'informatique à l'Ecole Polytechnique (et aussi, paraît-il, un des inspirateurs de la dernière réforme des programmes de mathématiques), nous montre les liens entre la démonstration mathématique et l'usage des ordinateurs à l'aide d'un exemple simple, celui des équations diophantiennes.
" Dieu n'existe pas et Dirac est son prophète ." (Heisenberg)
Jacques Vauthier, professeur à l'Université Pierre et Marie Curie (Paris VI), auteur de plusieurs ouvrages, aborde dans cette interview les implications philosophiques des mathématiques, le théorème de Gödel, mais aussi l'apport des mathématiques au dialogue entre les civilisations.
Un texte, un mathématicien : "Décrire mathématiquement les gaz : le défi de Boltzmann"
Avec Laure Saint-Raymond, Université Pierre et Marie Curie et Ecole normale supérieure.
Laure Saint-Raymond (35 ans) est l’une des mathématiciennes les plus actives de sa génération. Lauréate de l’un des prix de la Société Mathématique Européenne décernés au Congrès Européen de Mathématiques en 2008, elle a reçu en 2009 le Ruth Lyttle Satter Prize de l’American Mathematical Society.
Pour cette séance solennelle de l’Académie des sciences Jean Salençon, président de l’Académie des sciences, revient sur l’histoire de l’Académie Royale des sciences, des salons scientifiques et des missions de l’Académie. Écoutez également le discours de clôture d’Etienne Ghys, membre de l’Académie des sciences, sur l’harmonie du chaos.
"Le plus court chemin entre deux vérités du monde réel passe par le monde complexe" Hadamart
Sur la contribution de l'enseignement des mathématiques à l'apprentissage de la démarche scientifique Conférencier : Dominique Barbolosi, Université Paul Cézanne, Aix-Marseille III
J'ai ré-écouté cette conférence de Michel Serres qui n'est pas toute neuve puisqu'elle a été enregistrée à l'École Polytechnique en décembre 2005,mais tellement instructive et passionnante.
Dans cette conférence, Michel Serres aborde les nouvelles technologies sous un angle original,en questionnant ce qu'elles apportent de nouveau:
Le rapport à l'espace, la question du droit, l'externalisation des fonctions cognitives.
Ses réflexions le conduisent à montrer que dans le développement humain, chaque perte a permis de gagner une nouvelle fonction.
Michel Serres explique en particulier,avec ses talents de conteur et sa très grande culture d'historien des sciences,comment,au moment de l'invention de l'écriture,puis de l'imprimerie,puis de l'ordinateur,l'homme a successivement,à chaque fois,"perdu" de la mémoire :
La mémoire,au lieu d'être portée par le cerveau,est portée par un objet extérieur,le papyrus,le papier,puis l'ordinateur; nous n'avons plus de mémoire mais nous avons à notre disposition,au bout du doigt,toutes les mémoires du monde.
Nos étudiants perdent encore de la mémoire,ce n'est pas inquiétant,c'est dans la logique de l'évolution.Et ils vont gagner et l'humanité va gagner,sur d'autres tableaux...
Médecine numérique : vers un patient numérique personnalisé
Informatique et imagerie médicale : vers un patient numérique personnalisé
par Nicholas Ayache
Directeur de recherche à l'INRIA à Sophia Antipolis
Mieux comprendre le fonctionnement du corps humain grâce à l'informatique et l'imagerie médicale, mieux quantifier une pathologie et prédire son évolution, simuler précisément l'action d'une thérapie pour optimiser ses effets, tels sont certains des enjeux majeurs de la médecine numérique de demain. Nicholas Ayache montrera comment l'analyse et la simulation informatiques des images médicales permettent de construire une représentation numérique personnalisée du patient en ajustant des modèles géométriques, statistiques, physiques ou physiologiques du corps humain à ses images anatomiques et fonctionnelles.
Des milliers d'ellipses de plus au dessus de nos têtes.
Le 10 février 2009, une épave de satellite russe a percuté un satellite américain opérationnel. Le choc a répandu un grand nombre de débris dans l’espace .
La photo ci-dessous montre les orbites des débris de la collision,10 jours après la collision .
En 1609, Kepler démontra mathématiquement que les planètes (ou les satellites) "orbitaient" autour du Soleil sur des ellipses.
Christophe Bonnal ,ingénieur au CNES,nous parle des débris spatiaux
Mathias Fink, né en 1945, est un physicien français,professeur à l'École supérieure de physique et de chimie industrielles de la ville de Paris.Après des études de physique du solide, Mathias Fink s'intéresse à l'imagerie médicale et à l'acoustique. En 1973, il participe à la mise au point des premiers échographes médicaux ultrasonores en temps réel, en collaboration avec General Electric et Philips. Mathias Fink travaille ensuite sur les analogies existant entre les ondes acoustiques, la mécanique quantique et l'optique notamment sur la diffusion multiple et le chaos quantique. Il créé en 1990 à l'École supérieure de physique et de chimie industrielles de la ville de Paris le laboratoire Ondes et Acoustique et travaille sur la réversibilité des ondes acoustiques et le retournement temporel. Il met au point le miroir à retournement temporel qui trouve de multiples applications en médecine (imagerie médicale, lithotrie), pour la détection sous-marine, les télécommunications électromagnétiques à haut débit ou pour la domotique. Il s'intéresse plus récemment au renversement du temps dans les milieux de propagation complexes et désordonnés .
Mathias Fink succède à Gérard Berry à la chaire d'innovation technologique Liliane Bettencourt du Collège de France pour l’année universitaire 2008-2009. Il est membre de l'Académie des sciences depuis 2003 , médaille d'argent du CNRS (1995) et lauréat du Grand Prix Louis Néel 2008 de la Société Française de Physique.
Roland Schaer, philosophe, directeur Sciences et société, Cité des sciences et de l'industrie
" L'invention de l'écriture, voici 5000 ans, est un moment fondateur dans l'histoire longue des techniques graphiques d'Homo sapiens. Commencée peut-être avec les premiers motifs peints sur les corps ou les parois des grottes, cette histoire s'épanouit aujourd'hui avec la numérisation généralisée.
Prothèse de la mémoire, puisqu'on confie à un support matériel le soin de se souvenir pour nous. Prothèse de la parole, puisque nous devenons capables de parler aux absents et d'écouter les morts."
Conférence donnée pour la Fête de la Science, le 22 novembre 2008
« Cet exposé a pour fil conducteur un théorème dont l’énoncé a été formulé par Pierre de Fermat (1601-1665), juriste français qui a vécu au dix-septième siècle, et dont la démonstration a été achevée en 1994 par Andrew Wiles (1953- ), mathématicien anglais du vingtième siècle (et aussi du vingt-et-unième !). Ce théorème avait pris une telle place dans le paysage mathématique, et sa démonstration a constitué un tel événement dans la communauté scientifique, que les différents rapports qui en ont été faits ont été la plupart du temps très centrés sur la démonstration elle-même, sa stratégie, ses différents ingrédients. Je vais quant à moi prendre plutôt ce théorème pour prétexte pour faire un peu d’histoire, de sociologie et d’épistémologie (ce sont de bien grands mots !) sur les mathématiques et les mathématiciens. J’espère qu’il n’y a pas trop de gens dans l’assistance qui sont venus en se disant « chouette, je vais enfin comprendre le théorème de Fermat et je repartirai en sachant le démontrer ». Ceux-là seraient déçus ! Et je dois vous avouer tout de suite que je n’ai pas lu toute la démonstration du Grand Théorème (c’est comme cela qu’on l’appelle), et même, qu’il me faudrait vraisemblablement plusieurs mois de travail pour la lire et la comprendre entièrement. »
C’est sous le nom de "Nicolas Bourbaki", personnage imaginaire digne du mouvement dada, que neuf mathématiciens décidèrent en 1935 de prendre les mathématiques à leurs débuts et donner des démonstrations complètes. Les mathématiques ainsi unifiées devinrent "la mathématique". Parmi les membres fondateurs de ce groupe, Henri Cartan (1904-2008), de l’Académie des sciences. Retour sur ce moment de l’histoire des sciences en compagnie de Jean-Pierre Kahane.
"Les hommes sont-ils les créateurs des mathématiques ?
Sur cette question, deux points de vue s’affrontent :
- le point de vue des platoniciens pour qui les mathématiques existent en elles-mêmes, avant que l’homme ne les découvre.
- l’autre point de vue auquel adhère David Ruelle, consiste à admettre l’existence d’une réalité mathématique, mais ce que nous voyons est fortement influencé par la nature du cerveau humain.
Dans ce sens, David Ruelle ne partage pas totalement la citation de Galilée qui dit que « la nature est un grand livre écrit en langue mathématique ».
« Je ne pense pas que la nature s’exprime en langue mathématique ; ce sont les observateurs, les savants qui observent la nature et qui traduisent en langage mathématique ce qu’ils voient » explique le scientifique.
Au cours de cette émission David Ruelle revient également sur la formation du groupe Nicolas Bourbaki où neuf jeunes mathématiciens sortant de l’ENS, décidèrent en 1935 de prendre les mathématiques à leurs débuts pour donner des démonstrations complètes.
David Ruelle explique avec humour comment selon lui, le groupe devint malgré lui petit à petit « sénile et tyrannique » ! "
Mathématicien, logicien et informaticien, Gilles Dowek est professeur à l’Ecole polytechnique et chercheur au laboratoire d'informatique de l'Ecole polytechnique et à l'Institut National de Recherche en Informatique et en Automatique (INRIA). Auteur de plusieurs ouvrages de vulgarisation il a obtenu le Grand Prix de philosophie 2007 de l’Académie française pour "Les métamorphoses du calcul"
physicien, épistémologue, professeur émérite à l'université de Nice
"Si Galilée a été l'immense savant, fondateur emblématique de la science moderne, c'est qu'il était avant tout homme de culture. Ses lieux et milieux de formation puis de travail, à Florence, Venise, puis Florence à nouveau, en firent un excellent connaisseur de la littérature, de la musique et de la peinture de son temps, qui prit une part active aux débats de la critique artistique et littéraire. Mieux encore, ses compétences culturelles se révélèrent essentielles pour son travail scientifique. Tant les sujets que les méthodes et les formes d'exposition de ses recherches sont étroitement liés à sa profonde insertion dans la culture et les humanités, comme on le verra sur plusieurs exemples majeurs."
Pour les billets postérieurs à 2010, cliquez sur la rubrique située sous le billet
Pourquoi ce blog ?
J'ai commencé en 2005 par créer le site ABCMaths à des fins pédagogiques dans le but de l'utiliser en classe; au fur et à mesure de mes recherches internet, le site ABCMaths fut atteint d'une hypertrophie de liens, tous intéressants mais en surabondance.
D'où l'idée du blog destiné au départ à classer mes liens; et puis je me suis "pris au jeu"
A qui s'adresse ce blog ?
Au départ, il était fait pour moi, ainsi que je viens de l'expliquer; puis, constatant que quelques élèves et/ou collègues le visitaient régulièrement, cela m'a encouragé à le développer et à répondre davantage à un souci de vulgarisation afin d'atteindre un plus large public.
Je crois qu'il faut à la fois des articles récréatifs et d'autres plus sérieux: J'essaie d'introduire un peu d'histoire des mathématiques car je déplore que l'histoire des sciences en général soit totalement ignorée et pire, malmenée par les programmes scolaires.
D'autre part, les mathématiciens contemporains et en particulier l’école française de mathématiques, issue d’une longue tradition et occupant l’une des toutes premières places dans le monde, sont injustement méconnus du grand public, à mon sens.
Je tente, modestement, de réparer cette injustice.
Mes élèves le consultent-ils ?
Quelques élèves ou anciens élèves, les plus curieux au bon sens du terme, consultent mon blog régulièrement et c'est déjà très bien; même si le fait que je tienne un blog de maths n'a pas fondamentalement modifié ma relation avec les élèves, il ne l'a pas altérée, c'est une chose certaine .
De nombreux jeunes qui n'ont pas été mes élèves fréquentent le blog . Cependant, la majorité des visiteurs réguliers sont des adultes
(profs- pas seulement de maths- étudiants, élèves-ingénieurs, bibliothécaires et/ou blogueurs eux-mêmes, etc ...)
Quel est mon intérêt personnel à publier un blog ?
Au début, cela me « distrayait de certaines routines », c'est tout.
Puis, au fur et à mesure de de la progression des consultations ( j'ai actuellement une moyenne de 400 à 500 visites par jour sur le blog et 600 à 700 sur le site d'aide scolaire, provenant de France à 80 % et d'une petite dizaine de pays essentiellement pour le reste )
j'ai apprécié de sortir de mon isolement relatif. Grâce au blog, j'ai pu élargir mon horizon de connaissances en correspondant avec d'autres collègues et parfois d'autres pays. Même si ces connaissances sont « virtuelles », elles ont au moins le mérite d'exister.
En outre, je reçois régulièrement des messages personnels divers, de parents d'élèves qui parfois me demandent des conseils ou de collègues qui me demandent les originaux des fichiers géogébra du site d'aide scolaire, ou d'autres encore et qui tous m'encouragent à continuer mon travail et je n'y suis évidemment pas insensible .
Donc, bien que cette activité soit très chronophage,je continue au moins encore pendant quelques semaines.
GM - avril 2010.